L’incendie de Notre-Dame

  • Une heure à peine après que les flammes aient commencé à s’élever au-dessus de Notre-Dame – à un moment où personne ne pouvait donner une explication – les autorités françaises se sont empressées de dire que l’incendie était un “accident” et que “l’hypothèse d’un acte criminel avait été exclue.” Ces propos ressemblaient aux déclarations officielles faites par le gouvernement français après chacun des attentats perpétrés en France au cours de la dernière décennie.

  • L’incendie de Notre-Dame a également eu lieu à un moment où les attaques contre des églises en France et en Europe se multiplient. Plus de 800 églises ont été vandalisées en France en 2018.

  • Les églises en France sont vides. Le nombre de prêtres est en baisse et les prêtres en activité en France sont soit très âgés, soit africains ou latino-américains. La religion dominante en France est maintenant l’islam. Chaque année, des églises sont démolies pour laisser la place à des parkings ou à des centres commerciaux. Des mosquées sont construites partout, et elles sont pleines.

L’incendie qui a détruit une grande partie de la cathédrale Notre-Dame au cœur de Paris est une tragédie irréparable. Même si la cathédrale est reconstruite, elle ne sera plus jamais ce qu’elle était auparavant. (Photo de Veronique de Viguerie / Getty Images)

L’incendie qui a détruit une grande partie de la cathédrale Notre-Dame au cœur de Paris est une tragédie irréparable. Même si la cathédrale est reconstruite, elle ne sera plus jamais ce qu’elle était auparavant. Les vitraux et les principaux éléments architecturaux ont été gravement endommagés, et la charpente en chêne totalement détruite. La flèche qui s’élevait de la cathédrale était une œuvre d’art unique. Elle avait été dessinée par l’architecte qui a restauré l’édifice au XIXe siècle, Eugène Viollet-le-Duc, qui avait fondé son travail sur des documents du XIIe siècle.

En supplément de l’incendie, l’eau nécessaire pour éteindre les flammes a pénétré dans le calcaire des murs et de la façade et l’a affaibli, et rendu friable. La toiture a disparu: la nef, le transept et le choeur sont maintenant en plein air, vulnérables aux intempéries. Ils ne peuvent même pas être protégés avant que la structure n’ait été examinée de manière approfondie, une tâche qui prendra des semaines. Trois éléments cruciaux de la structure (le pignon du transept nord, le pignon situé entre les deux tours et la voûte) sont au bord de l’effondrement.

Notre Dame a plus de 800 ans. Elle a survécu aux turbulences du Moyen Âge, au règne de la Terreur pendant la Révolution française, à deux guerres mondiales et à l’occupation nazie de Paris. Elle n’a pas survécu à ce que la France est en train de devenir au 21ème siècle.

La cause de l’incendie a été attribuée à “un accident“, “un court-circuit” et, plus récemment, à “un problème informatique“.

Si l’incendie était vraiment un accident, il est en réalité presque impossible d’expliquer comment celui-ci a pu s’enclencher. Benjamin Mouton, ancien architecte en chef de Notre-Dame, a expliqué que les règles étaient extrêmement strictes, et qu’aucun câble ou appareil électrique ni aucune source de chaleur ne pouvaient être placés dans les combles. Il a ajouté qu’un système d’alarme extrêmement sophistiqué était en place. L’entreprise qui a installé l’échafaudage n’a pas utilisé de soudure et est spécialisée dans ce type de travail. L’incendie s’est déclaré plus d’une heure après le départ des ouvriers, et aucun d’entre eux n’était présent. Il s’est propagé si rapidement que les pompiers qui se sont précipités sur les lieux dès qu’ils ont pu y arriver en ont été choqués. Rémi Fromont, l’architecte en chef des monuments historiques français a déclaré: “L’incendie ne pouvait pas naitre de l’un des élément présents à l’endroit où il a démarré. Une charge calorifique est nécessaire pour déclencher un tel désastre”.

Une enquête longue, difficile et complexe va être menée.

La possibilité que l’incendie soit le résultat d’un acte criminel ne peut être écartée. Une heure à peine après que les flammes aient commencé à s’élever au-dessus de Notre-Dame – à un moment où personne ne pouvait donner une explication – les autorités françaises se sont empressées pour dire que l’incendie était un “accident” et que “l’hypothèse d’un acte criminel avait été exclue. ” Ces propos ressemblaient aux déclarations officielles faites par le gouvernement français après chacun des attentats perpétrés en France au cours de la dernière décennie.

En novembre 2015, le soir du massacre du Bataclan à Paris, au cours duquel des djihadistes ont assassiné 90 personnes, le ministère français de l’Intérieur a déclaré que le gouvernement ne savait rien, si ce n’est qu’une fusillade était en cours. La vérité n’a commencé à se faire jour qu’après que l’Etat islamique ait revendiqué la responsabilité du crime.

À Nice, après l’attaque au camion, en juillet 2016, le gouvernement français a insisté pendant plusieurs jours pour dire que le terroriste qui a écrasé 86 personnes était un “homme souffrant de dépression nerveuse“.

En 2018, l’assassin de Sarah Halimi, qui récitait des versets du Coran tout en torturant sa victime, a été déclaré “perturbé mentalement”, et placé en détention dans un établissement psychiatrique immédiatement après son arrestation. Il ne sera probablement jamais jugé. Le 8 avril, Alain Finkielkraut et 38 autres intellectuels ont publié un texte disant que le meurtrier ne devait pas échapper à la justice. Le texte n’a eu aucun effet.

L’incendie de Notre-Dame a eu lieu moins de trois ans après qu’un “commando” composé de femmes djihadistes ait tenté de détruire la cathédrale en faisant exploser des bouteilles de gaz. Trois jours avant l’incendie, le 12 avril dernier, la chef du commando, Ines Madani, une jeune française convertie à l’islam, a été condamnée à huit ans de prison pour avoir créé un groupe terroriste affilié à l’État islamique.

L’incendie de Notre-Dame a également eu lieu à un moment où les attaques contre des églises en France et en Europe se multiplient. Plus de 800 églises ont été vandalisées en France en 2018. Nombre d’entre elles ont subi de graves dégâts: statues décapitées, tabernacles brisés, excréments jetés sur les murs. Dans plusieurs d’entre elles, des feux ont été allumés. Le 5 mars, la basilique Saint-Denis, où sont enterrés tous les rois de France, sauf trois, a été dégradée par un réfugié pakistanais. Plusieurs vitraux ont été brisés et l’orgue de la basilique, trésor national construit entre 1834 et 1841, a été endommagé et en partie détruit. Douze jours plus tard, le 17 mars, un incendie s’est déclaré à Saint Sulpice, la plus grande église de Paris, causant de graves dégâts. Après des jours de silence, la police a finalement admis qu’il s’agissait d’un acte criminel.

Depuis des mois, des organisations djihadistes publient des déclarations appelant à la destruction d’églises et de monuments chrétiens en Europe. Notre Dame a été designée à plusieurs reprises comme cible primordiale. Malgré tout, la cathédrale n’était pas bien protégée. En novembre dernier, de jeunes hommes, entrés de nuit dans la cathédrale, ont grimpé sur le toit de l’édifice et ont tourné une vidéo qu’ils ont ensuite diffusée sur YouTube.

Au moment de l’incendie, des personnes portant des noms musulmans ont posté sur les médias sociaux – Twitter, Facebook, le site Web d’Al Jazeera – de nombreux messages exprimant la joie de voir détruit un important symbole chrétien. Hafsa Askar, une immigrante d’origine marocaine et une vice-présidente de l’Union nationale des étudiants de France (UNEF), l’une des principales organisations étudiantes françaises, a publié un tweet qui disait: “Les gens pleurent sur de petits morceaux de bois … c’est une illusion de petits blancs”.

Le Président français Emmanuel Macron, qui n’a pas dit un mot sur les attaques de la basilique de Saint-Denis ou de l’église Saint-Sulpice, s’est rendu à Notre-Dame le soir de l’incendie et a déclaré: “Notre-Dame, c’est notre histoire, notre littérature, notre imaginaire”. Il a totalement laissé de côté la dimension religieuse de la cathédrale.

Le soir suivant, il a dit que Notre-Dame serait reconstruite dans cinq ans: ce fut une déclaration audacieuse. De nombreux commentateurs ont considéré ses paroles comme dictées par sa volonté désespérée d’essayer de regagner la confiance des Français après cinq mois de manifestations, d’émeutes et de destructions résultant de son incapacité à gérer le soulèvement des “Gilets jaunes”. (Le 16 mars, une grande partie des Champs-Élysées a été saccagée par des émeutiers; les réparations ont à peine commencé.) Tous les experts s’accordent pour dire qu’il faudra certainement plus de cinq ans pour reconstruire Notre Dame.

Macron a étrangement ajouté que la cathédrale serait “plus belle” qu’avant – comme si un monument gravement endommagé pouvait être plus beau après sa restauration. Macron a poursuivi en disant que la reconstruction pourrait être un “geste architectural contemporain”. La remarque a suscité l’inquiétude, voire la panique, chez les défenseurs des monuments historiques, qui craignent maintenant qu’il veuille ajouter des éléments architecturaux modernes à un joyau de l’architecture gothique. Une fois encore, il a totalement laissé de côté la dimension religieuse de la cathédrale.

L’attitude de Macron n’est pas surprenante. Depuis qu’il est devenu président, il s’est tenu à l’écart de toute cérémonie chrétienne. La plupart des Présidents qui l’ont précédé ont fait de même. La France est un pays où règne une laïcité dogmatique. Un dirigeant politique qui ose se dire chrétien est immédiatement critiqué par les médias et ne peut que nuire à sa carrière politique. Nathalie Loiseau – ancienne directrice de l’École nationale d’administration et tête de listedu parti créé par Macron, “La République en marche “, pour les élections européennes de mai 2019 – est récemment allée à la messe, ce qui a conduit à un débat dans les médias sur la question de savoir si sa présence à une cérémonie religieuse dans une église était un “problème”.

Les résultats de la laïcité française sont visibles. Le christianisme a été presque complètement éliminé de la vie publique dans le pays. Les églises en France sont vides. Le nombre de prêtres est en baisse et les prêtres en activité en France sont soit très âgés, soit africains ou latino-américains. La religion dominante en France est maintenant l’islam. Chaque année, des églises sont démolies pour laisser la place à des parkings ou à des centres commerciaux. Des mosquées sont construites partout, et elles sont pleines. Des imams radicaux font du prosélytisme. L’assassinat, il y a trois ans, de Jacques Hamel, un prêtre âgé de 85 ans égorgé par deux islamistes alors qu’il disait la messe dans une église où seulement cinq personnes (dont trois vieilles religieuses) étaient présentes, est un signe éloquent.

En 1905, le parlement français a adopté une loi stipulant la confiscation de tous les biens de l’Église catholique en France. Les églises et les cathédrales sont devenues la propriété de l’État. Depuis lors, les gouvernements successifs ont dépensé très peu d’argent pour les entretenir. Les églises qui n’ont pas été vandalisées sont en mauvais état, et la plupart des cathédrales ne sont pas en meilleur état. Avant même l’incendie dévastateur qui vient de se produire, l’archidiocèse de Paris avait déclaré qu’il ne pouvait “pas se permettre de faire toutes les réparations” dont Notre Dame aurait besoin, “qui étaient évaluées à 185 millions de dollars”. SelonCBS News, dans un rapport du 20 mars 2018 :

“Le gouvernement français, propriétaire de la cathédrale, a promis environ 50 millions de dollars pour la prochaine décennie, ce qui laisse une facture de 135 millions de dollars. Pour obtenir le reste, Michel Picaud, Président des amis de Notre-Dame de Paris a lancé une levée de fonds en France et outre-Atlantique.

“Nous savons que les Américains sont riches, alors nous allons dans les endroits où nous pensons pouvoir trouver de l’argent pour contribuer à la restauration de la cathédrale”, a-t-il déclaré.”

Le soir de l’incendie, des centaines de Français se sont rassemblés devant la cathédrale en flammes pour chanter des psaumes et prier. Ils ont semblé comprendre qu’ils perdaient quelque chose de précieux.

Le gouvernement français a décidé de collecter des dons de particuliers, d’entreprises et d’organisations pour mener la reconstruction. Plus d’un milliard d’euros ont été rassemblés. Des milliardaires français ont promis de grosses sommes: la famille Pinault (les principaux propriétaires du conglomérat de distribution Kering) a offert 100 millions d’euros, la famille Arnault (les propriétaires de LVMH, la plus grande société de luxe au monde ), 200 millions d’euros, la famille Bettencourt (propriétaires de l’Oréal), elle aussi 200 millions. Beaucoup de gens de gauche en France ont immédiatement déclaré que les familles riches avaient trop d’argent et que ces sommes seraient mieux utilisés pour aider les pauvres que pour s’occuper de vieilles pierres.

Pendant des années, le cœur de Paris portera les terribles cicatrices d’un feu qui a dévasté bien plus qu’une cathédrale. L’incendie de Notre Dame a détruit une partie essentielle de ce qui reste de l’âme presque perdue de la France et un témoignage concret de ce que la France pouvait accomplir lorsque les Français croyaient en quelque chose de plus grand que leur propre existence.

Certains espèrent que la vue de la cathédrale détruite incitera de nombreux Français à suivre l’exemple de ceux qui ont prié le soir de l’incendie. Michel Aupetit, archevêque de Paris, a déclaré le 17 avril, deux jours après la catastrophe qu’il était convaincu que la France connaîtrait un “réveil spirituel”.

D’autres, moins optimistes, voient dans les cendres de la cathédrale un symbole de la destruction du christianisme en France. L’historien de l’art, Jean Clair, a écritqu’il voyait dans la destruction de Notre-Dame un signe supplémentaire d’une “décadence irréversible” de la France et de l’effondrement final des racines judéo-chrétiennes de l’Europe.

Un éditorialiste américain, Dennis Prager, a noté:

“Le caractère symbolique de l’incendie de la cathédrale Notre-Dame, l’édifice le plus célèbre de la civilisation occidentale, l’emblème et l’icone du christianisme occidental, est flagrant.

“C’est comme si Dieu lui-même voulait nous avertir de la manière la plus évidente que le christianisme occidental est en flammes – et avec lui la civilisation occidentale.”

Un autre auteur américain, Rod Dreher, a souligné:

“Cette catastrophe à Paris est un signe pour tous les Chrétiens, et un signe aussi pour tous les Occidentaux, en particulier ceux qui méprisent la civilisation qui a construit ce grand temple pour son dieu sur une île de la Seine où des rites religieux ont été célébrée depuis les jours de la Rome païenne. C’est le signe de ce que nous perdons et de ce que nous ne retrouverons pas si nous ne changeons pas de cap immédiatement. “

Pour le moment, rien n’indique que la France et l’Europe occidentale vont changer de cap.

Lettre au Président Macron. Par Jean Taranto

 

Lettre au Président Macron. Par Jean Taranto

par admin

” Monsieur Macron, je ne veux pas que vous conditionniez la reconstruction de Notre-Dame à l’inauguration des olympiades de Paris et au centenaire des Jeux olympiques de Pierre de Coubertin à Paris.

Je ne veux pas que vous arbitriez l’avancée des travaux sans une enquête judiciaire probante, libre, et aux attendus dûment rendus publics et non censurés par l’Etat. Je ne veux pas que vous choisissiez les prestataires et les mécènes en fonction de vos intérêts financiers personnels, diplomatiques et oligarchiques. Je ne veux pas que vous fassiez de la France le chantier de votre terne et minable splendeur personnelle ni que vous pensiez pouvoir acheter le vote des catholiques en les prenant en otage par des discours mielleux et démagogiques et des décisions amorales et hâtives.

Les catholiques ne sont ni des moutons ni des agneaux bêlants et réactionnaires sans voix articulée ni une minorité médiévale insignifiante. Ils constituent les classes moyennes qui ont tout votre mépris (et et pourtant, comme catholique de province baptisé à l’entrée de votre adolescence, vous en faites intrinsèquement partie).

Je ne veux pas que vous transformiez Notre-Dame en “laboratoire” de la modernité universelle et que vous vous preniez pour l’évêque Jacques du Chastelier.

Je ne veux pas que vous mettiez Mérimée, Hugo et Viollet-Le Duc à la place qui n’est pas la leur ni que vous les retiriez de la place qui est la leur.

Je ne veux pas qu’après avoir détruit les partis, dissous le pluralisme journalistique, contribué au désordre parlementaire, vous fassiez de même avec le peuple qui tout entier, même laïc se reconnait dans le christianisme qui a servi de base à la Constitution révolutionnaire.

Sans les chrétiens, la morale chrétienne et le peuple chrétien, sans la foi chrétienne, la pratique quotidienne qui notamment n’a pas attendu l’incendie pour consacrer temps argent et moyens aux pauvres et au indigents de la planète, et l’art chrétien, la France est morte. Vous avec et vos idéaux aussi.

Ne prenez pas le peuple pour ce qu’il n’est pas et la cathédrale pour l’inespérée opportunité de vous refaire une santé électorale. Vous courrez aux pires échecs et à la fin de toute l’histoire de la France. Elle nous englobe, nous dépasse et aussi nous constitue et nous engage.

Nous voulons la vérité et non le mensonge, un ministre des cultes qui n’ait pas l’air de se foutre du monde, un président qui préside et ne règne pas, un gouvernement qui prend ses responsabilités et ne les rejette pas sur les corps intermédiaires et des parlementaires qui ne se servent pas des réseaux sociaux pour empuantir l’atmosphère déjà enfumée à leur seul profit. Aussi, je vous demande de sommer les syndicats de faire le choix de la République pluraliste et de la civilisation et de ne pas entretenir en leur sein extrémistes, anarchistes, fanatiques et imbéciles subventionnés.

Il y va de futurs incendies, inextinguibles ceux-là
Merci.

Un citoyen, électeur, patriote et chrétien.”

Jean Taranto

Il y a deux ans, une Française juive était tuée sauvagement à Paris aux cris d’«Allah akbar».

Pour info

Monique

 

 

 

FIGAROVOX/TRIBUNE – Il y a deux ans, une Française juive était tuée sauvagement à Paris aux cris d’«Allah akbar». La question du discernement du suspect est au cœur de l’instruction. Une troisième contre-expertise a conclu à son irresponsabilité. Trente-neuf intellectuels, parmi lesquels Alain Finkielkraut, Jacques Julliard, Pierre Manent, Pierre Nora, Mona Ozouf et Paul Thibaud, demandent que ce crime soit jugé.

Voici deux ans, dans la nuit du 3 au 4 avril 2017, à Paris, dans une HLM de Belleville, rue Vaucouleurs, Sarah Attal-Halimi, une retraitée de 65 ans, était tirée de son sommeil à 4h30 par un voisin âgé de 27 ans. Kobili Traoré se déchaîne contre elle, il la frappe pendant plus de vingt minutes. Les cris de douleur de madame Halimi alertent immédiatement les voisins qui entendent aussi les insultes que Traoré lui adresse, les «Allahou Akbar» et autres psalmodies coraniques. Un petit effectif de police est rapidement sur les lieux, mais pensant être en présence d’un terroriste, les policiers n’interviennent pas et attendent des renforts. Tout le monde entend donc le calvaire de Sarah Halimi. Finalement, peu avant 5h00, Kobili Traoré défenestre sa victime, tout en criant à la police postée dans la cour: «attention! Une femme va se suicider», comme pour couvrir ce geste final qui tuera sa victime. Le rapport du médecin légiste est terrible: «la mort de Sarah Halimi est due à un poly-traumatisme par chute d’un lieu élevé», relevant «des lésions d’hémorragie massive pulmonaire, myocardique, méningée, et diverses fractures associées», plus d’une vingtaine sur le corps et le visage.

Avant son forfait, l’assassin s’était d’abord introduit dans l’appartement mitoyen, celui de la famille Diarra. Il ne cherche pas à les attaquer. Effrayés par la grande nervosité de Kobili Traoré qu’ils connaissent bien, leurs familles venant du même village du Mali, les Diarra se verrouillent dans une pièce et contactent la police, se considérant comme «séquestrés» par Kobili Traoré. En fait, ce dernier avait quitté les lieux pour enjamber le balcon et entrer par effraction chez Sarah Halimi. Il reprendra le même chemin à l’issue du meurtre pour venir terminer ses prières et changer de vêtements chez les Diarra. La police attend toujours sur le palier… Presque une heure après le début des faits, la porte est enfoncée. L’Arrêt du 5 juillet 2018 indique «précisément à 5h35, les effectifs de la BAC du 11èmearrondissement assistés d’effectifs de la BAC 75, présents sur les lieux suite à l’appel d’une des filles de la famille Diarra ayant indiqué que sa famille était victime de séquestration, interpellaient Traoré, en train de réciter des versets du Coran». Kobili Traoré n’oppose aucune résistance à l’interpellation. Mais à son arrivée au commissariat, il est pris d’un soudain accès de violence. Il sera immédiatement transféré en hôpital psychiatrique. Il ne fera pas une minute de garde à vue, ni ne sera interrogé par la police.

Pour mieux étouffer l’affaire, on communautarise le crime.

La sauvagerie de ce crime fit irruption dans une campagne électorale où les sujets de sécurité sont quasi absents. Cet assassinat dérange, le profil de l’assassin sans doute davantage que celui de la victime. D’autant que le caractère antisémite du crime est vite identifiable: Kobili Traoré a ciblé sa victime, il ne s’est pas attaqué à un membre de la famille Diarra chez qui il s’est invité en pleine nuit, il a fait ses prières avant d’aller chez Sarah Halimi, cette voisine qu’il côtoie depuis vingt ans qu’il traitera de «Sheitan» (Satan) tout en la frappant. L’enquête de voisinage montrera que Sarah Halimi et ses proches qui la visitaient, avaient été l’objet d’insultes antijuives de la part de certains membres de la famille Traoré. Dans les heures et jours précédant le crime, la police apprendra qu’il avait fréquenté assidûment la mosquée salafiste défavorablement connue de la rue Jean-Pierre Timbaud. Tout cela est embarrassant en pleine élection présidentielle et les candidats comme les médias généralistes ignorent l’évènement. Pour mieux étouffer l’affaire, on communautarise le crime: «l’émotion dans la communauté juive» est évoquée, comme pour passer à autre chose, comme si Sarah Halimi n’était pas, d’abord, une citoyenne française.

Deux mois après cet assassinat barbare, pour rompre ce silence médiatique, dix-sept d’entre nous avions publié une tribune pour informer l’opinion publique. Deux ans après, rejoints par d’autres signataires, nous venons informer des avancées de l’enquête, de la probabilité d’un non-lieu «psychiatrique» pour le mis en examen. Alors que Kobili Traoré a reconnu les faits d’homicide dès le départ, la juge principale du dossier, Anne Ihuellou, aura paru conduire une instruction à décharge, davantage qu’à charge et à décharge, posture équilibrée de mise au cours d’une instruction.

Tout d’abord rappelons les épisodes de la procédure judiciaire. Après son interpellation et son accès de violence au commissariat, Kobili Traoré est placé en Unité pour Malades Difficiles (UMD). Il reconnaît les faits, mais assure n’avoir pas été dans son état normal. Le 10 juillet 2017, il est mis en examen pour homicide volontaire. La gravité de l’affaire conduit dès le départ à la nomination d’une seconde juge, Virginie Geyte. Entre le crime et cette mise en examen, l’élection présidentielle et les législatives sont passées ; l’affaire est désormais davantage médiatisée, notamment autour de son caractère antisémite de cet assassinat.

Kobili Traoré est un délinquant multirécidiviste connu dans son quartier, craint dans son immeuble. Il vend notamment de la drogue, il est lui-même un consommateur compulsif de cannabis. Si son casier est déjà chargé par vingt-deux condamnations pour violences et vols, il n’a en revanche aucun antécédent de troubles psychiatriques. Avant le 3 avril 2017, il a été incarcéré à quatre reprises, dont une peine d’un an qu’il vient d’accomplir. Au cours de ses périodes de prison, Kobili Traoré n’a apparemment pas été identifié par l’administration pénitencière pour des troubles psychologiques quelconques.

Tout au long de la procédure, les avocats de la partie civile ont été contraints de faire des demandes d’actes pour être tenus informés de l’avancée de l’instruction.

Le 27 février 2018, a enfin lieu l’interrogatoire du mis en examen devant la juge Ihuellou. Après onze mois, sur insistance du Parquet, la juge finit par retenir la circonstance aggravante d’antisémitisme. En revanche, elle et sa collègue résistent à toute reconstitution, ce qui est pourtant habituel dans les affaires criminelles de ce type. Il serait, en effet, indispensable de clarifier la chronologie des faits en organisant une reconstitution, d’autant que ce crime a pratiquement eu lieu sous les yeux des voisins et de la police, que des témoignages ont été recueillis et doivent être mis en regard des faits tels qu’ils pourront être reconstitués in situ. Pour les avocats des deux parties, il est nécessaire de vérifier l’enchainement des évènements durant ces 70 minutes, entre le moment où Kobili Traoré pénètre chez les Diarra et celui où il est interpelé, de retour chez eux, après l’assassinat de Sarah Halimi. L’avocat du mis en examen lui-même accède à la logique d’une reconstitution, mais la juge Ihuellou s’y oppose, par humanisme à l’égard de Kobili Traoré, voulant «protéger le mis en examen d’une possible décompensation et d’un milieu hostile (…) lui qui ne possède plus que des bribes de souvenirs filmiques» (sic).

Tout au long de la procédure, les avocats de la partie civile ont été contraints de faire des demandes d’actes pour être tenus informés de l’avancée de l’instruction. Suite à une saisie d’un d’entre eux en janvier 2018, la 6è chambre de l’instruction est réunie le 30 mai. Le 5 juillet 2018, elle annonce suivre l’avis de la juge concernant la non-opportunité de reconstitution. Pas plus que ne sont retenus les actes de torture et de barbarie ainsi que la préméditation que les avocats de la partie civile avaient demandé voir inscrits dans le cadre de l’instruction. Depuis cette date, aucun nouvel acte de procédure n’a été réalisé.

La procédure judiciaire est aussi ponctuée par des rebondissements d’expertises psychiatriques essentielles dans ce dossier puisque les conclusions des experts-psychiatres sur l’état de Kobili Traoré au moment de la commission des faits, contribuent à déterminer le choix des juges d’instruction: le renvoi devant la Cour d’Assises ou le non-lieu pour irresponsabilité pénale.

Une première expertise est ordonnée. La juge désigne un expert-psychiatre reconnu, Daniel Zagury. Au bout de six mois, il conclut que Kobili Traoré a fait une bouffée délirante aiguë (BDA) suite à une consommation massive de stupéfiants (cannabis). Zagury estime qu’il y a eu altération du discernement mais que le mis en examen est responsable. A ce titre, il peut être jugé devant une cour d’Assises. Il indique que l’identification de Sarah Halimi comme juive l’a diabolisée aux yeux de Kobili Traoré: «L’existence avérée d’une bouffée délirante aiguë n’était pas incompatible avec une dimension antisémite. Un crime pouvant être délirant et antisémite». Pour Daniel Zagury, le simple préjugé antijuif se serait transformé en conviction absolue que Sarah Halimi était l’incarnation du Sheitan (Satan) à tuer. Il explique en outre que la lucidité dont a fait preuve l’assassin avant de la défenestrer est compatible avec une BDA.

Est-ce parce que cette expertise déplaît à la juge d’instruction qu’elle en ordonne une seconde? On peut se poser cette question dans la mesure où ce type de requête provient habituellement de l’avocat de la Défense, qui ici n’avait formulé aucune demande en ce sens. Cette fois, Anne Ihuellou nomme trois experts au lieu d’un. Kobili Traoré est entendu le 24 mai pendant deux heures par deux experts- psychiatres, et le 7 juin durant deux heures trente par le troisième. Ils viennent contredire la première expertise et rendent leurs conclusions le 10 juillet 2018: la BDA de Kobili Traoré signifie pour eux abolition du discernement. À leurs yeux, il était irresponsable au moment des faits. La juge pourrait dès lors prononcer un non lieu ; il n’y aurait pas de procès aux Assises. Voici quelques extraits édifiants de ce second rapport d’expertise: «Kobili Traoré souffre d’un trouble psychotique chronique, vraisemblablement de nature schizophrénique, faisant suite à un épisode délirant aigu inaugural. Il souffre par ailleurs d’une addiction ancienne au cannabis. Il dispose encore d’une personnalité pathologique antisociale et d’une propension à la violence. Oui, son discernement était aboli. Kobili Traoré est inaccessible à une sanction pénale. (…) Nous sommes en plein accord avec le diagnostic d’état psychotique aigu et avec l’analyse qui est faite de la dimension antisémite du geste, même si nous ne pensons pas qu’elle a été déterminante dans le processus psychopathologique du passage à l’acte. Nous dirions en résumé que Monsieur Traoré était au moment des faits, du fait de la prégnance du délire, un baril de poudre. Mais que la conscience du judaïsme de Madame Attal a joué le rôle de l’étincelle».

La psychiatrisation serait-elle le nouvel outil du déni de réalité ?

Outre qu’au cours de sa vie Kobili Traoré – qui a croisé à de nombreuses reprises l’institution judiciaire – n’a jamais été détecté comme porteur de «trouble psychotique chronique» ; outre qu’il est rarissime qu’une pathologie schizophrénique surgisse à 27 ans sans aucun antécédent clinique ; outre que l’apparition brutale de troubles délirants suite à l’usage de stupéfiants est peu probable chez un sujet qui consommait depuis des années de fortes quantités de cannabis… On pourrait penser à lire les dernières lignes que nous avons soulignées, qu’en France, aujourd’hui, être juif serait, en quelque sorte, une incitation au meurtre pour les déséquilibrés psychiatriques. Et puisque les trois experts désignent Traoré comme schizophrène, a-t-on observé une recrudescence de passage à l’acte criminel antijuif chez les centaines de milliers de personnes souffrant de schizophrénie en France? Si c’était le cas, ce serait une nouvelle expression de cette pathologie qui devrait alerter urgemment l’Académie de médecine… À moins qu’il ne s’agisse de proposer à l’opinion une réinterprétation des assassinats de Français juifs depuis 2003 par des islamistes? La psychiatrisation serait-elle le nouvel outil du déni de réalité?

Devant ces conclusions contraires à la première expertise, les deux juges en commandent une troisième. Quatre experts devaient rendre leur conclusion en octobre 2018, elles ont finalement été reçues mi mars 2019. Interminable attente pour la famille et leurs avocats. Finalement, cette troisième expertise confirme l’avis de la précédente: Kobili Traoré était victime d’une BDA avec abolition du discernement.

Désormais, la balle est dans le camp des deux juges d’instruction. Elles peuvent rendre une ordonnance de non lieu «psychiatrique», avec un renvoi vers la chambre de l’instruction pour juger notamment des mesures de sureté à prendre à l’égard de l’assassin. Dans ce cas, la société tout entière se trouvera exposée car ses médecins affirment que Kobili Traoré va mieux, qu’il ne souffre pas de pathologie mentale chronique. Sa place ne sera donc ni en prison (irresponsabilité pénale pour abolition du discernement lors de la commission des faits), ni en hôpital psychiatrique (absence de pathologie mentale chronique). Il est à parier, que d’ici quelques mois, l’amnésie médiatique aidant, il sortira libre de l’hôpital psychiatrique où il réside actuellement, avec une simple obligation de suivi psychiatrique en ville.

Mais les juges ne sont pas tenues par les expertises judiciaires pour ordonner le non lieu. Elles peuvent aussi décider de rendre une ordonnance de mise en accusation devant la Cour d’Assises. On ne saurait ignorer la possibilité d’un acquittement si les jurés estiment que Kobili Traoré était pénalement irresponsable comme l’affirment deux expertises sur trois. Néanmoins, il y aurait un procès, des débats contradictoires. Existerait au moins un espoir que justice soit rendue à Sarah Halimi, victime d’un assassinat antisémite barbare.

Signataires : Michel Aubouin, ancien préfet ; Élisabeth Badinter, philosophe ; Georges Bensoussan, historien ; Laurent Bouvet, professeur de science politique ; Pascal Bruckner, philosophe ; Philippe d’Iribarne, sociologue ; Élisabeth de Fontenay, philosophe ; Bernard de la Villardère, journaliste ; Jacques de Saint Victor, historien ; Alain Finkielkraut, philosophe ; Martine Gozlan, journaliste ; Noémie Halioua, journaliste ; Jacques Julliard, historien ; Suzanne Julliard, professeur de lettres ; Alexandra Lagnel-Lavastine, philosophe ; Josépha Laroche, politiste ; Michel Laval, avocat ; Marcel Gauchet, philosophe ; Damien Le Guay, philosophe ; Jean-Pierre Le Goff, sociologue ; Barbara Lefebvre, essayiste ; Bérénice Levet, philosophe ; Sonia Mabrouk, journaliste ; Yves Mamou, journaliste ; Pierre Manent, philosophe ; François Margolin, réalisateur ; Lina Murr Nehmé, historienne ; Pierre Nora, historien ; Michel Onfray, philosophe ; Mona Ozouf, historienne ; Céline Pina, essayiste ; Pierre-André Taguieff, historien ; Jacques Tarnero, chercheur ; Paul Thibaud, philosophe ; Michèle Tribalat, démographe ; Monette Vacquin, psychanalyste ; Caroline Valentin, essayiste ; Jean-Pierre Winter, psychanalyste ; Michel-Gad Wolkowicz, psychanalyste.

 

Barbara LEFEBVRE