Jérusalem – Gaza : manifestations ou incidents frontaliers ?

16 mai 2018

Manipulation : Guerre semi-conventionnelle ou manifestations pseudo-pacifiques?

Des titres terrifiants reprennent sous une forme remise à jour un vieux thème que l’on pensait suranné. Le crime rituel se conjugue à tous les temps et il frappe d’autant plus l’imagination dans l’ignominie que sa victime est jeune. Périodiquement, cette tendance à condamner Israël pour crimes contre l’humanité refait surface, et on regarde de travers tous les Juifs devenus bourreaux d’enfants par extension.

On a tous en mémoire le dicton encourageant supposé chinois qui dit à peu près : «Ne te laisse pas abattre par l’échec ; essaie et essaie encore jusqu’à ce que tu réussisses». Si cette parole de sage était énoncée à l’intention des écoliers pour le bien, elle peut l’être par symétrie axiale pour le mal. «Ne te laisse pas abattre par la lutte contre l’antisémitisme et l’antisionisme, dirait le postulat révisé. La machination en 2000 n’a pas marché, on t’a même causé du remord suite à l’exécution sauvage de Daniel Pearl. Mais en 2018, ne laisse pas passer une belle occasion de retenter ta chance. Elle t’est certes offerte par un des pires mouvements terroristes crapuleux, mais la fin justifie les moyens, et l’antisionisto-sémitisme n’a pas d’odeur», pourrait nous dire aujourd’hui cette même sagesse.

Il serait dangereux de rester nonchalant en se disant qu’Israël est dans son bon droit et sous-estimer le venin des formateurs d’opinions qui décident de réécrire l’histoire en direct, au moment même où elle se déroule sous nos yeux. Le révisionnisme et le négationnisme, dont les préfixes viennent nier le sionisme, ont fait d’énormes progrès. Ils ont refait totalement leur garde-robe. L’observateur attentif, à qui «on ne la fait pas», notera que le transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem passe petit à petit parmi les titres de second ordre, voire d’entrefilet dans les pages intérieures, quand il n’est pas présenté comme source de tous les maux.

L’actualité au Proche-Orient n’est pas la concrétisation de la reconnaissance des droits du peuple juif à sa souveraineté sur son sol, à son retour et à son rassemblement en ses frontières, mais ce qu’un mouvement reconnu internationalement comme inhumain a décidé de mettre en avant.

Et ça marche! Le regardeur de télévision se laisse avoir. Et cette propagande qui fait du  Juif un tueur d’enfants parvient à ses fins, car même des gens très braves qui regardaient d’un bon œil le transfert de l’ambassade américaine ont été bernés par les titres qui rivalisent en machiavélisme. «Bain de sang à Gaza» est assez banal, mais «Israël tire sur les manifestants» est bien plus cyniquement et sataniquement génial.

La manipulation fait dire aux paisibles et honnêtes citoyens : «Bon, d’accord, le Hamas est l’une des pires organisations terroristes. Si l’occasion se présentait, elle assassinerait volontiers les six millions de Juifs qui vivent en Israël, mais de là à tirer sur de “paisibles manifestants”.»    

La désinformation est au moins aussi néfaste qu’un médecin dont les diagnostics sont inexacts. Tous deux peuvent tuer. Prescrire des calmants à un patient qui souffre de maux de ventre chroniques et aigus alors qu’il est encore temps de procéder à l’ablation d’un début de tumeur maligne n’est pas moins dangereux que  d’accuser le gouvernement israélien et par extension tout Israël et tout le peuple juif de meurtres d’enfants et de tirs sur des manifestants pacifiques pendant qu’on y est.

Aurait-on déjà oublié le mobile de l’assassin de sang froid du rabbin et des enfants juifs dans la cour de l’école de Toulouse? A la limite, même si le diagnostic qui ne voit que des manifestations pacifiques et qui prescrit à Israël des calmants appelés retenue était honnête, les gouvernements européens, France et Allemagne en tête, devraient s’imposer ainsi qu’à leurs médias cette retenue qu’ils prescrivent aux autres, et éviter à tout prix de faire ou de laisser faire des gros titres qui seront interprétés de telle sorte qu’ils se changeront en incitation à la haine du Juif et résulteront sur le terrain par des attaques antisémites.

Une telle précaution existe, puisque les autorités allemandes interdisent à la presse de révéler dans leur pays l’identité ou l’appartenance ethnico-culturelle d’adultes qui abusent réellement de leurs femmes et de leurs filles. S’il est tabou de dire qu’un violeur est musulman, pakistanais ou marocain, alors que les faits sont attestés, la moindre des honnêtetés intellectuelles doit exiger a fortiori que l’on évite de désigner, en pleine propagande d’images fournies par le Hamas, avec tout l’aspect douteux qui s’entend, les soldats de Tsahal comme des tireurs sur des manifestants pacifiques. A moins que le ménagement et le souci d’éviter l’amalgame ne soient sélectifs.

Du côté du téléspectateur (eh oui, ça existe encore à l’ère de l’internet, il y en a même qui se servent de leur ordinateur comme d’une télé au lieu d’élargir leurs horizons), combien de consommateurs d’idées prémâchées seront en éveil et objecteront : «Un instant, il s’agit d’une manifestation un peu spéciale. Elle n’est pas sur une place publique mais sur une frontière. Admettons que ça ne change  pas grand-chose. Mais n’étant pas né de la dernière pluie, j’ai ouï dire que des illégaux africains avaient violé la frontière d’Israël. Les cas où ils se sont fait tirer dessus, c’était par l’armée égyptienne. Alors, s’agit-il d’un revirement ou est-ce que les médias nous mentent?»

Et si on s’intéressait un peu à ce qui se dit du côté de Tsahal? Le porte-parole de l’armée a révélé dans une allocution d’une petite minute, tellement la problématique occupe des proportions réduites, la technique de guerre du Hamas : se servir des civils comme d’un leurre et introduire dans cette masse des terroristes armés dans le but d’échapper à la vigilance des soldats défenseurs d’Israël et d’atteindre les localités juives dans le but d’y perpétrer des massacres.

Les civils servent d’écran de fumée et de cinéma et font donc double emploi :

1. Tenter d’introduire des terroristes armés comme susmentionné ;

2. Attirer les caméras sur cet écran, faire de la peine et réveiller ou attiser les vieux démons antijuifs.

Normalement, lorsque le mouvement  terroriste accuse Tsahal d’avoir tué un bébé, deux mouvements d’indignation devraient se retourner contre les fournisseurs d’images :

 1. Les soupçonner d’avoir tué tout seuls ce bébé pour accuser les Juifs ;

2. Les condamner sans appel pour entrainer des civils, dont des femmes et des enfants, sur le champ de bataille. Les conventions internationales, les conventions de Genève, de la Haye, ont pourtant clairement  statué  l’interdiction du travail des enfants et, cela va sans dire, de les faire participer physiquement à des conflits.

 

Un soldat francophone, cité par le groupe FB Jérusalem au cœur, témoigne : «Aujourd’hui (15 mai 18), j’y étais, j’ai tout vu… Je les ai vus jeter des pierres, non pas avec les mains, mais avec des frondes, j’ai vu des enfants de dix ans, au milieu de la fumée provoquée par les pneus brûlés, du gaz, dans l’espoir d’être blessés pour pouvoir m’accuser. J’ai vu un homme… pousser les femmes et les enfants vers la barrière avec des pierres dans l’espoir qu’un d’entre eux soit tué… J’ai vu… la haine dans les yeux… essayer de traverser la barrière dans l’espoir de me lyncher, de me kidnapper, ou de faire un attentat dans une des villes derrière moi… J’en ai vu un essayer de me tirer dessus avec une kalachnikov… je les ai  vus essayer de transporter par le biais de cerfs-volants des explosifs, des cocktails  Molotov, ou des objets enflammés dans le but de m’atteindre, d’atteindre des civils, ou brûler ma terre… Je les ai presque suppliés de ne pas m’obliger à tirer sur eux, mais eux l’ont fait quand même et pire, m’ont envoyé leurs femmes et  les enfants. »

Ne nous serions-nous pas attendus à ce que les condamnations pleuvent sur le Hamas et que l’indignation générale reconnaisse enfin leur véritable face? Ils sont pourtant connus pour leur stratégie de guerre : ouvrir les hostilités en privilégiant les tirs sur les victimes civiles innocentes. Prenons un exemple : le 22 août 2014, un vendredi soir, Daniel Tordjman, quatre ans, joue en famille dans le salon, au kibboutz de Na’hal Oz. L’alerte retentit. En trois secondes, une roquette le frappe de plein fouet, juste à côté de son père, devant la maison, en chemin pour l’abri qu’il n’atteindra jamais. A-t-on vu la presse titrer en masse : «Le Hamas, bourreau d’enfants juifs»?

Hier (le 15 mai), Tsahal a détruit tout un arsenal de missiles au Nord de la bande de Gaza. Quel média a-t-il titré : «Opération de Tsahal au secours des enfants juifs»?

Pour revenir à la stratégie de guerre du Hamas, elle est semi-conventionnelle. Elle est conventionnelle dans la mesure où elle fait avancer un régiment de fantassins sur la frontière, à la recherche de l’affrontement aux fins d’investir le territoire agressé. Elle ne l’est pas dans la mesure  où elle déplace devant les milices armées des boucliers humains, ce qu’une communauté internationale devrait humainement condamner.

Cette marche du  pseudo-retour reprend trait pour trait la stratégie des trois dernières guerres contre Israël : placer les batteries de missiles au milieu d’une population civile retenue par la force, sur les toits d’écoles ou d’hôpitaux, ou de l’Unrwa, organisation profitant de son statut diplomatique pour stocker les missiles. De deux choses l’une : ou bien Israël se laisse bombarder sans broncher, ce qui est à même de plaire à une opinion encline à plaindre, voire à verser une larme, sur le Juif quand il est victime, ou bien Israël neutralise les rampes de lancement, protège sa population, et se voit alors accusé de bombarder des civils, et on retombe sur l’accusation séculaire d’un Tsahal tueur de bébés.

Mais bien entendu, certains, et non des plus inoffensifs, préfèreront crier à l’assassinat de manifestants pacifiques, et occulter, puisqu’il n’y a pas plus idiot que celui qui ne veut pas comprendre, les méthodes exécrables du Hamas, qui a d’ailleurs bien choisi son nom, puisqu’il désigne textuellement dans la Bible le vol avec violence, entre autres pratiques à l’origine du déluge.

Comment, les Juifs seraient heureux, victorieux? Leur qualité de non-apatrides serait reconnue par la plus grande puissance mondiale? Et ils remettraient en question des décennies d’avilissement et de formatage phallocentrique de la femme en remportant l’Eurovision avec une candidate qui ose se présenter telle qu’elle est et qui incite l’image du «super-canon» à se révolter ou à aller se rhabiller? Sûr qu’on va la leur gâcher, la fête.

Le pouvoir politico-médiatique qui refuse à Israël sa légitimité a toujours eu besoin de se fabriquer une base polémiste consistant dans une victime emblématique poursuivie par le Juif. Mais la propagande est bien plus bornée et virulente aujourd’hui que dans des périodes sombres. Une histoire tirée du folklore juif se résume à peu près ainsi : Dans la banlieue de Vienne, un riche aubergiste juif, spécialiste des chevaux, avait un employé non-juif qui lui servait entre autres de cocher. Il était en bon termes avec le gouverneur. Des jaloux kidnappèrent le jeune employé et accusèrent le Juif de l’avoir tué pour récupérer son sang qui aurait été l’un des ingrédients du pain azyme. Rabbi Leb, un éminent rabbin, avait l’habitude, quand il passait dans la région, d’être hébergé chez cet aubergiste. Bref, il demande au gouverneur s’il a besoin de chevaux et qu’il aurait intérêt à exploiter une dernière fois le savoir du condamné pour en acheter. Un marché se tient dans une ville lointaine. Le rabbin s’y rend avec le condamné dont les proches sont retenus en otage. Un mendiant leur tend la main. L’ex-aubergiste reconnaît son employé. Il le ramène chez le gouverneur, les faux témoins sont confondus et condamnés.

Aujourd’hui, même si vous retrouvez la victime, on vous exécutera quand même. «Non, ce n’est pas lui, c’est un sosie.» Ou s’il a été tué par ceux qui vous accusent sans la moindre preuve, comme au carrefour de Netzarim en 2000 et près de la barrière de Gaza en 2018 : «Vite, bâclons le procès, avant que la supercherie ne soit établie». Et quand les preuves deviennent trop flagrantes : «Oh, et puis, taisez-vous, rabat-joies!» Et les communiqués du porte-parole, du gouvernement, des ambassadeurs d’Israël deviendront inaudibles.

Toutefois, certains médias – ce qui prouve que le combat contre la diffamation antijuive sert un peu à quelque chose – se montreront prudents, telle cette première de couverture de Libération, qui titre, histoire de faire passer aux Juifs l’envie de sourire : «Jérusalem-Gaza, une ambassade et un massacre». Ne voulant pas se risquer sur la pente glissante de la publication d’un cadavre d’enfant, ce qui peut aller très loin, ils ont préféré faire parader deux brutes épaisses et mal-rasée. D’autant que le nom de Jérusalem dans le titre équivaut  – qu’ils le veuillent ou non – à leur reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israël, puisqu’ils nomment le conflit qui oppose Jérusalem à Gaza. 

Il ne faut pas se leurrer : la prise de conscience qui a annoncé quelques décennies de jours heureux pour les Juifs en Europe, n’a été pour finir que le résultat d’une énorme panne : on était en rupture de stock de victime désignée du Juif. Le génocide a rendu les victimes traditionnelles inexploitables. On en a fabriqué une nouvelle, sur la base d’un travail de longue haleine : inverser les rôles entre David le Juif et Goliath l’antijuif, réduire un monde arabe hostile aux mesures d’un tout petit peuple «palestinien». Ce travail a commencé chez les défenseurs du mensonge déguisé en vérité, ceux que promouvait la Pravda, comme en a témoigné par la suite Ion Mihai Pacepa, conseiller du président roumain Ceausescu et espion soviétique, qui avait fait défection avant de se réfugier aux Etats-Unis.

Souhaitons au petit-grand peuple d’Israël de continuer à s’acheminer sur la voie de la reconnaissance par les nations, et de sa pleine rédemption. Que ses ennemis tombent sous ses pieds et que se réalise le principe de «bien mal acquis ne profite jamais» pour tous ceux qui pensent tirer leur épingle du jeu en s’accoquinant avec des dictatures peu recommandables comme l’Iran ou le Qatar. «La pérennité d’Israël ne sera ni démentie ni invalidée» (I Samuel XV, 29).